Je ne crains pas de l’avouer : un instant, l’idée de renoncer à cet exercice éditorial m’a effleuré et je doute encore parfois de la pertinence de persévérer à commenter ce qui ne mérite pas le commentaire, à qualifier l’inqualifiable, à déplorer le déplorable . Est-ce l’arrivée d’une lumière plus tendre, d’une douceur soudaine, comme un souffle printanier, et me voilà à nouveau devant mon clavier, toujours un peu maussade mais suffisamment requinqué pour tenter une fois de plus d’honorer le contrat moral qui me lie à ma station de radio préférée.
Jamais peut-être autant de confusion, de bêtise et de haine ne se sont affichées à la une de l’actualité, à la une des quotidiens et des hebdos. Si bien que l’on ne sait plus qui est qui, de Libaro ou de Figation, d’Expriane ou de Mariess : mêmes couvertures, mêmes accroches, mêmes appels subliminaux à la haine, à la simplification qui va avec, revendication de la vulgarité comme valeur telle qu’elle est promue par une égérie aussi Frigide que Barjot. Confusion du commentaire de ceux qui sont censés détenir la connaissance, l’expertise, avec cette suffisance que l’on rencontre le plus souvent au front des imbéciles et aux JT qu’ils accompagnent, confusion du discours des politiques, à tel point que parfois on ne sait plus qui parle de Mélanpen ou de Lepanchon, méfiance de l’autre s’il est différent, homophobie affichée, tout est bon dans/pour le cochon qu’on engraisse à la peur et à la haine.
Climat délétère, où l’essentiel* devient inaudible, l’accessoire tonitruant, où l’outrancier s’oppose au raisonnable, où la durée cède devant l’immédiat, climat toxique où s’affichent obscurantisme et égoïsme de classe, où prolifèrent approximations et simplifications, ainsi pourrit la belle idée démocratique. La démocratie, c’est le débat, pas l’invective, la libre expression pas l’insulte, l’argumentation, la proposition, pas le déni ni l’indifférence. Suffit !
Et quand ma copine, fervente catho, confie au mécréant que je suis : « quand j’entends Boutin et les évêques, c’est Jésus qu’on assassine ! » je suis saisi d’un immense sentiment de fraternité. FRATERNITE.
J’en aperçois quelques-uns qui ne manqueront pas de me trouver naïf, pour ne pas dire benêt,du genre « tout le monde il est beau... ». J’assume. Mais que je sache la haine n’ a jamais fait avancer l’humanité , et qu’il me soit permis de préférer Pierre Mendès France à Pierre Laval, Jean Jaurès à Philippe Pétain, et - j’assume - François à Nicolas.
Allez, une dernière pour la route : « L’égoïsme et la haine ont seuls une patrie, la fraternité n’en a pas ». Ainsi s’exprimait, le 27 avril 1848, celui qui signa le décret de l’abolition de l’esclavage, Lamartine. Bel anniversaire en vérité.
MA
* Un exemple de la une que vous avez manqué : : en France, 1 enfant sur 5 est pauvre