Il y a des jours comme ça où on se réveille mal luné suite à une nuit d’insomnies justifiées ou non, ou à cause du radio réveil qui, on ne sait pour quelle raison, s’est mis en marche quatre fois plus fort que d’habitude, comme pour hurler la misère du monde à nous qui l’écoutons sereinement au chaud. Ce matin, j’avais vécu les deux : les insomnies et le radio réveil. Quelques injures, un oreiller balancé à l’aveugle sur mes !# ?&3 !?! de chats, la tête sous la couette, et c’était réglé. Jusqu’à ce que, malgré l’épaisseur de mon duvet, j’entende Mickaël Thebault débiter les titres de l’actualité sur France Inter...
D’après ce qui me reste vu l’état embrumé de mon cerveau à cette heure-là, ça ressemblait à ça :
Le Japon va mal. Stop. Une japonaise désespérée au bord des larmes vivant à Paris témoigne de l’état dans lequel se trouve sa famille. Stop. Une partie de sa famille est à Sendai. Stop. L’autre partie survit à Fukushima. Stop. Des hélicoptères ont réussi à déverser 30 000 litres d’eau sur le réacteur numéro 3 de la centrale. Stop. C’est un succès. Stop. Non, en fait il en faudrait trois fois plus par heure pour contrôler la situation. Stop. A 8h ce matin, on recensait au Japon 5178 morts. Stop. 8600 disparus. Stop. Des millions de sinistrés. Stop. En fait ce serait des dizaine de milliers de morts. Stop. La zone sinistrée par le tsunami mesure 300 kilomètres de long sur 7 de large. Stop. Stop. Stop. Stop. Stop. Stop. Stop. Stop. Stop. Stop. Stop. Stop. Stop. Stop. Stop. Stop.Stop. Stop. Stop. Stop. Stop. Stop. Stop. Stop. Stop. Stop. Stop. Stop. Stop. Stop. Stop. Stop. Et non, pas stop ! Les nouvelles ne s’arrêtent pas là. Nos ministres et autre président de la République parlent du pire. Ca y est. Le pire ! Ils ont balancé le mot, comme de nombreux médias depuis quelques jours.
Kosciusko-Morizet : « scénario du pire ».
Baroin : « possibilité du pire des scénario ».
Sarkozy : « situation très grave [...blablabla...] si la situation va en empirant [...blablabla...] »
Le pire. C’est quoi le pire ? Marre du pire.
Voilà pour le Japon.
Juste après, c’était la Libye. C’est vrai que le Japon est arrivé au bon moment pour la Libye. Elle passe au second plan dans les médias. Une aubaine pour Kadhafi. Et pour Sarko aussi, sûrement (Nooon ! Kadhafi aurait financé sa campagne !!!?!!!). Le deuxième sujet du journal de 8h sur France Inter, c’était à peu près ça :
La Libye va mal. Stop. Kadhafi annonce une bataille décisive aujourd’hui jeudi 17 mai 2011. Stop. Le Conseil de Sécurité de l’ONU vote aujourd’hui pour une zone d’exclusion aérienne au-dessus de la Libye. Stop. L’ancien Premier Ministre belge dénonce la passivité de l’Europe. Stop. Bernard-Henri Lévy milite pour des frappes aériennes. Aaaargggghhh. Stop. Stop. Stop. Stop. Stop. Je me lève du pied gauche ! Stop. BHL est l’invité de Patrick Cohen. Argh. Stop. Argh. BHL, en usurpateur d’identité du Ministre des Affaires Etrangères, va donner son avis sur la Libye. Stop. J’écoute BHL. Stop. Monsieur est très impliqué. Stop. Monsieur connaît le terrain comme sa poche. Stop. Il est allé à Benghazi il y a dix jours. Stop. Avec les insurgés. Stop. Evidemment. Stop. Monsieur BHL a causé à notre président de la République pour lui donner des conseils sur la politique à mener. Stop. Monsieur BHL a fait l’entremetteur entre Sarkozy et les trois représentants du Conseil national de transition libyen. Stop.
Une fois de plus, Monsieur BHL montre qu’il se comporte en valeureux reporter de guerre risquant sa pâle peau sur les terrains minés. Comme en Géorgie. Comme en Afghanistan aussi. Toujours du côté des insurgés. Evidemment. Toujours du côté de la justice. Toujours du côté du peuple. Comme à Gaza... Merci BHL. Et puis en 8 minutes 37 il a réussi à placer une pichenette à la gauche. Et une autre à Ahmadinejad. Pas un mot sur le Japon. Très fort BHL. Une pièce unique. Personne n’aurait fait mieux. La nouvelle positive du jour, c’est qu’au moins la vie est belle pour BHL et qu’il ne s’ennuie pas trop. Stop.
E.P