Si les toutes nouvelles générations de mélomanes ne savent pas (encore) de qui il s’agit, Gil Scott-Heron représente une référence importante de la musique américaine. Celui qui est considéré comme le pionnier du rap, farouche militant contre l’apartheid et le racisme, n’avait pas sorti d’album studio depuis plus de dix ans.
Dès l’introduction du disque, « On Coming from a Broken Home » l’affirme : Gil Scott-Heron est de retour. Et il ne s’agit pas ici d’un come-back à seule visée pécuniaire et à faible intérêt artistique, mais bien d’un retour flamboyant. « Me and the Devil » semble rassembler les talents de Massive Attack et de Curtis Mayfield. « I’m New Here », écrite par Bill Callahan, exploite à merveille les qualités vocales de Gil Scott-Heron, proposant une folk song délicatement influencée par Leonard Cohen. « I’ll Take Care of You » est une chanson d’amour classiquement soul, mais d’une rare force d’expression. « New York is Killing me » s’avère une merveille épurée de rythmique… Chaque morceau est légitime, et même les interludes – au nombre de quatre – sont nécessaires à la charpente de cet album soigné et sobrement réussi.
Mêlant acoustique et électronique, I’m New Here démontre la puissance d’une orchestration à la fois simple et très exigeante. Les cordes sont tout simplement parfaites, et la richesse générique de la musique, qui passe de l’ambient au gospel en passant par l’americana, le jazz ou le trip-hop, est un écrin idéal pour la voix soul de Gil Scott-Heron, enchanteur conteur par excellence. Ses histoires, toujours aussi visuelles et relevées, ne pourraient mieux se faire comprendre qu’ici. I’m New Here est, surtout, l’histoire d’un renouveau. Celui d’un poète qui chante, inlassablement, la paix et son american dream. Et qui livre un des plus beaux albums de ce début d’année 2010.